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Lettre ouverte à un auteur qui se reconnaîtra

Ecrire une chronique pour un roman qu'on apprécie pas, c'est un challenge.... et en même temps, l'exercice est plutôt édifiant. Comme marcher sur une corde sans filet.

C'est pourquoi j'ai imaginé de ne pas révéler l'ouvrage en question mais au premier internaute qui devinera le roman évoqué ici, -  sans tricherie, s'il vous plaît, je l'offre !

Voilà ce que je retiens de ma lecture qui est comme elle est. Ce roman, écrit par J... C... en 2020, est une saga qui nous conduit à toute allure de 1960 à 2020 entre Orpierre et Livingstone : autobiographique, elle place sur le devant de la scène des personnages remarquables par ses prises de positions humanistes. A mi-chemin entre road-trip, carnets de voyages et souvenirs, l'ouvrage est essentiellement focalisé sur ses personnages, qui a dit ou fait quoi et quand.


A priori, le projet d'écriture ne pose aucun problème. Du moins ce que j'en ai compris.

J'ajoute que la langue utilisée est impeccable, fluide, limpide, sans cafouillage.

Alors qu'est-ce qui ne fonctionne pas pour moi ?

D'habitude, quand je n'entre pas dans un texte, je parviens à identifier une cause possible, soit dans la construction des décors et personnages, soit dans les rythmes des dialogues et du récit, soit dans l'usage de la langue. La plupart du temps, je peux proposer un "modelage" d'un ou deux paragraphes pour donner un exemple de ce qui pèche à mon avis.
Or, dans ce cas, impossible.

D'habitude, quand je ne m'y retrouve pas, j'essaie de contacter l'auteur pour en savoir davantage sur ses intentions. Par exemple, comme dans le cinéma d'art et d'essai ou encore les expositions d'art contemporain, il est plus facile de regarder une œuvre en connaissant le contexte de sa création.
D'ailleurs, si l'on regarde attentivement ce qui se passe en littérature, on voit bien que les lecteurs seront fortement influencés par la promotion culturelle médiatique. C'est ce qui rend l'abord de l'édition personnelle plus difficile. Bref. La discussion avec JC ne recelait aucun indice susceptible d'éclairer mes difficultés de lecture. Au contraire même, les références avancées en littérature me plaisaient aussi, comme par exemple Jean-Philippe Toussaint ou encore le Nouveau Roman...


Il ne restait plus qu'à replancher pour tenir ma promesse d'avis de lecture...

J'ai l'impression d'être un lecteur déraciné

C'est comme si je n'avais pas de place dans ce récit. Comme si la véritable action se déroulait en dehors de mon champ de vision, hors cadre. Je ne me sens pas concernée.

J'ai pensé qu'il y avait sans doute une question de génération. Même si j'essaie d'élargir au maximum mes approches en littérature, je suis indéniablement influencée par ma culture et mon histoire. La littérature américaine, Miller, Roth, Chandler, Steinbeck ne me bouleversent pas. Les questions politiques traités de façon tranchée m'échappent aussi car je considère que le silence des pantoufles est plus terrifiant que le bruit des bottes.

J'ai pensé que l'auteur était sans doute un homme d'action et que ce roman correspondait à l'imaginaire d'hommes d'affaires à la vie trépidante qui ne se perdent pas en conjectures contemplatives. Le rythme est très soutenu, si bien qu'au bout de quelques pages, j'ai l'impression d'avoir un point de côté et je dois reprendre mon souffle.

J'ai pensé que j'avais besoin de plus de descriptions - mais il y en a suffisamment après vérification,
plus de psychologie - mais il y en a suffisamment après vérification,
plus d'explications - mais il y en a suffisamment après vérification,
plus de dialogues - mais il y en a suffisamment après vérification,
plus de variété de styles - mais il y en a suffisamment après vérification,
...
Tout y est.
Alors je me suis dit : C'est simple, je ne suis pas lectrice-cible, je n'ai pas les références ou la culture adéquate. C'est pourquoi ça ne marche pas pour moi. Mais pour d'autres, pour Amélie Nothomb, il n'y a pas de problème.

Reste que j'ai un petit doute quand même... Est-ce que cela vient vraiment de moi ?


La critique littéraire hors de tout contexte culturel ou commercial est extrêmement glissante. Elle pose la question de la légitimité : en quoi mon avis, partial, subjectif voire hâtif, intéresserait qui que ce soit, a fortiori l'auteur du roman que je ne comprend pas ? Quand j'ai apprécié un ouvrage, je laisse parler mon enthousiasme, en pensant que mon avis pourrait éventuellement promouvoir le livre en question ou inciter quelqu'un à l'acquérir. Dans le cas contraire, je me défausse habituellement lors d'une discussion téléphonique. Sauf que là, j'ai promis d'écrire mon avis. Oups.

Donc le voici : j'ai l'impression de lire un compte-rendu d'activités, rédigé avec sérieux et application, dans les règles si l'on peut dire mais sans âme. La réécriture autobiographique romancée prend pour moi un tour fantasmagorique dont je n'identifie pas clairement l'intention. Ou alors c'est comme une histoire de famille et d'amis qui ne ressemblent pas à mon entourage et que je n'aurais pas spécialement envie de connaître. Je survole juste sans parvenir à m'intéresser comme si les personnages et les actions étaient factices et artificiels malgré les nombreuses références géographiques et chronologiques. Tout est si clair, net et précis mais superficiel, effleuré, simplifié ou peut-être caricaturé, telle une esquisse à la mine de plomb. Les scènes représentées ne bénéficient pas pour moi d'une ambiance cinématographique mais sont comme surexposées devant la lumière aveuglante d'un projecteur qui dissimule le projectionniste. Dans un silence fatal. Quant à moi, je suis une intruse.


Voilà mon ressenti à la lecture de ce roman contemporain.

En tous cas, je remercie vivement l'auteur pour la qualité de notre conversation téléphonique, sa patience et son courage. Son second ouvrage est déjà paru, dans un tout autre genre, dont je ne peux vous donner le titre car il serait trop facile de trouver quel est le livre évoqué ici.

Si vous voulez constater par vous-même ce que ce livre raconte (et je vous le recommande car il ne faut jamais se fier aux avis négatifs, ni positifs du reste), si vous pensez avoir deviné l'ouvrage dont il est question, faites-moi signe sur cebedoc72@gmail.com ou au 0767907659.

Au plaisir de vous lire 📚🍀
Céline
 






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