Songes Poétiques - Pascal en Rimes


Chronique d'Alain Iametti

"J’ai lu « Songes Poétiques » de Pascal En Rimes.

Avant d’ouvrir un recueil de poésie, je prends une première précaution, celle de m’extraire de la gangue environnante qui oblitère notre sensibilité. Nous avons érigé tel l’oignon des dizaines de peaux protectrices qui étouffent le germe sensible en notre cœur. Dès la première rime, du rythme des mots surgit la tonalité, elle permet d’atteindre l’harmonie, il faudra laisser le corps s’absoudre de la pesanteur.

J’entre chez Pascal En Rimes, guidé par deux boussoles placées à équidistance de ma conscience : l’une est l’émotion de la découverte, l’autre la technique des phrases.

Chez Pascal En Rimes, c’est l’astrolabe de l’émotion qui prend le pas sur la technique.

« Le poète traverse siècle et temps, du présent au temps d’antan. »


Tautologie, parole d’évangile, ou bras d’honneur au matérialisme économique qui nous étreint. L’ « a » grave de l’assonance rythmique nous transporte au début des temps, l’incipit se définit comme programmatique. Le style a franchi les codes anciens des troubadours pour s’exprimer en sa propre syntaxe.

Tournons les pages… engageons-nous sur la voie des « Songes Poétiques »

« écrire c’est… »


Le balancement anaphorique et ses rythmiques déclinent le passage de l’inculture vers la connaissance, mais l’expérience n’est pas sans danger de cicatrices.

Rapidement les rimes délaissent la métaphore pour la chair, oui, le poète est charnel.

« Les lèvres sont des lumières, »


Est-ce pour lui ou le quidam que sa voix réclame à chacun la destinée qu’il mérite ?

« Dans les ruelles du désespoir,

où l’on trouve le plus subtil des espoirs ;

chacun mérite sa place »

Pourtant…

« Puisque plus rien n’est objectif, la rancœur fruit de la rancune »


Ce fruit va jeter l’incompris, le délirant, le rejeté… vers les herbes où il pourra poursuivre son rêve, « sa vision devient panoramique ». Mais toujours ces affrontements contre les murs de bétons de la norme, des stupres, des pensants…


« cafards répressifs » « corruption sociale » « gangrène insidieuse »


L’extralucide sollicite de « Madame ou Mademoiselle liberté : pouvoir d’agir sans contraintes. »

Hélas on lui renvoie, « ce sale pognon… voler devient banal… » Lucide, il entrevoit des séismes… où naissent des angoisses… alors vient l’errance… où l’on sombre.

« à la recherche de la subtile combinaison »


A travers les saisons, la solitude « veux-tu la noirceur de mes émois ? » le transcendant poursuit insouciant… insoumis… décadent… vers son horizon sulfureux… croisant

« les faussaires qui ont ouvert les portes de l’exclusion toujours plus pauvres »

« Comme un cri d’enfants »


Le medium extralucide exsude ses perceptions, le poète n’a pas sa place dans ce monde rationnel… il en crève. C’est sa « passion » pourtant, il n’en déviera pas. Malgré « l’usure du temps » Après ce flot de noirceur, il cherche la synthèse dans l’expression ramassé du « haiku » 5+7+5… dix-sept syllabes lapidaires qui résument un état.

« Si le cœur est mort

Au gré du printemps rêveur

Silence amoindri. »


L’art du sage japonais ne calme pas la violence de soif d’être. L’alcool, aide à supporter la révolte des corps sanglants gisant au Bataclan… un grand maelstrom indescriptible… un enchevêtrement… un effondrement.

Vient lentement des espérances, l’errance poétique libère, il a tout essayé pour oublier et pourtant, il sait qu’il y a tant de drames… tant de femmes victimes… il est conscient impuissant… il ne règlera pas le compte de l’immonde salaud.

L’enfant est de ce siècle, il est sensible, charnel… humain.

« Tous les sens à l’apogée au gré d’érections physiques et cérébrales »


Mais lui, le révolté ne tient pas à être lénifié il a atteint le fond de sa pensée… il sait… il peut formuler ce qu’il a vu dans le songe de sa longue errance… de bateau ivre.

« Ils veulent uniformiser nos pensées


Ils veulent nous isoler


Ils veulent tout contrôler…


Ils veulent


Et ils veulent…"


Le poète rejette le diktat, alors il rompt… solitude volontaire… de loin, il observe… sans doute jusqu’à son prochain Songe Poétique…

« j’étais tout là-haut dans ce phare »



J’ai lu d’un trait « Le paradis des ombres » Songe qui me laissa songeur… abstraction ou réalité… métaphore ou littéral ? Quittant l’espace sensible, je me drape à présent des techniques pour comprendre la forme, celle qui fait saigner la révélation. Pascal En Rimes tel Nietzsche qui « philosophait à coups de marteau » cogne sa vérité. Le texte du songe se divise en LV chapitres… on notera que la numération est exprimée en chiffre romain… comble de l’archaïsme pour un poète du XXIème siècle… un clin d’œil, une fleur de rhétorique…

Chaque texte bien que répondant à la technique de la rime, se développe selon le mode en cascade des mots, moins de signifié et plus de signifiant. Les phrases s’enchaînent à coups de maillet sans liant lien embrayeur qui font la douceur bien propre des jolis textes arrondis… des professeurs bien tempérés « N’est-il point mon cher ? » Je préfère les phrases martelées dépouillées d’artifices lubrificateurs.


Pascal est celui qui révèle sa vérité. On n’est pas obligé de souscrire à ces noirs tableaux, chacun s’adapte à sa mesure dans l’environnement social « à chacun sa lecture de la société » Mais, Pascal est un révélateur qui nous interpelle sur nos réalités face aux autres…

Il écrit selon un style maîtrisé… on a le droit d’aimer sa poésie… c’est mon cas… sa rêveuse vérité nous questionne, laisse en nous un écho moins rêveur que songeur… N’est-ce point l’alpha et l’oméga du poète

   « faire bondir ses mots. »?



Merci à Alain Iametti

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